"Vivant comme en rêve, elle tenait les propos comme d'un fantôme qui eût parlé. Les fleurs du printemps n'attiraient plus ses regards, et leur paraissaient obscures; elle prenait pour le plein jour la clarté de la lune d'automne; l'aurore d'un jour de neige ne lui semblait pas blanche; le chant du coucou par un crépuscule d'été ne parvenait plus à ses oreilles […] Elle perdit finalement toute notion des choses. Sa passion, que sa pudeur cachait, apparut dans ses regards, et ses paroles trahirent ses désirs amoureux."
Ihara Saikaku, "
Histoire d'une belle de Himeji".

18 PÉRIODES: 4 février - 4 mai

1- RISSHUN 立春
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ARRIVÉE DU PRINTEMPS

4-18 février


東風解凍  4-9 février
L
e vent printanier fait fondre les glaces.

黄鶯睍睆  10-14 février
Le rossignol commence à chanter.

魚上氷 15-19 février
D
ans les rivières en dégel, les poissons réapparaissent.

2- USUI 雨水
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PLUIES NOURRICIÈRES

19 février-5 mars


土脉潤起  19-23 février
La terre se nourrit de l'eau des pluies.

霞始靆 24-28 février
Premières nappes de brouillard.

草木萠動 1-5 mars
Apparition des premiers bourgeons.

3- KEICHITSU 啓蟄
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FIN DE L'HIBERNATION

6-20 mars


蟄虫啓戸  6-10 mars
La terre se réchauffe et les insectes sortent de leur hibernation.

桃始笑 11-15 mars
Floraison des fleurs de pêchers.

菜虫化蝶 16-20 mars
Les chenilles deviennent papillons.

4- SHUNBUN 春分
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EQUINOXE DE PRINTEMPS

21 mars-4 avril


雀始巣  21-25 mars
Les moineaux commencent à construire leur nid.
桜始開 26-30 mars
Les fleurs de cerisiers commencent à éclore.
桜始開 31 mars-4 avril
Le tonnerre se fait entendre au loin.

5- SEIMEI 清明
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TEMPS CLAIR ET PUR

5-19 avril


玄鳥至  5 au 9 avril
Les hirondelles reviennent du sud.
鴻雁北 10 au 14 avril
Les oies sauvages repartent vers le nord.
虹始見 15 au 19 avril
On aperçoit à nouveau l'arc-en-ciel après la pluie.

6- KOKU-U 穀雨
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PLUIES BIENFAITRICES POUR CÉRÉALES

20 avril-4 mai


葭始生  20-24 avril
Graminées et autres roseaux bourgeonnent.
霜止出苗 25-30 avril
Le givre fond et les pousses de riz grandissent.
牡丹華 1-4 mai
Les pivoines fleurissent.

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COMME LE JAPON
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Ôgata Kenzan, Pruniers

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Raku Chôjirô, 1516-1590?

"Le goût japonais pour la céramique présente une particularité que l'on peut constater depuis la préhistoire: la prédilection des Japonais pour la poterie ou le grès. Sans doute la poterie est-elle moins raffinée que la porcelaine, mais les Japonais considèrent qu'elle est plus naturelle, plus proche d'une nature. C'est un fait que les Japonais apprécient les formes rustiques, tantôt dépourvues de symétrie, tantôt irrégulières. On peut même souligner qu'à la différence des Chinois qui ont toujours été attachés à mener jusqu'à la perfection la technique de la porcelaine, les Japonais ont au contraire, souvent préféré la céramique de terre cuite, même après l'introduction au Japon de cette technique venue de Chine qu'ils ont par ailleurs parfaitement assimilée puis élaborée à leur tout […]
Cette esthétique fondée sur l'aspect rustique, qui relève au fond déjà, d'une idée autochtone devant la Nature, a marqué à jamais le goût des Japonais pour la sobriété. C'est ainsi qu'avec le bol à thé de Chôjirô, la famille Raku qui, originairement exerçait le métier de tuilier, se spécialisera désormais dans la production de poteries".
"Kenzan, potier ermite", Yasuko Ôno

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羊羹 [yôkan], confiserie traditionnelle

La cuisine est un art présent dans la vie de tous les jours, elle fonde donc un style. Au Japon, c'est celui de l'ombre. On peut manger l'obscurité, la goûter, sentir "fondre sur la pointe de votre langue comme une parcelle de l'obscurité de la pièce".
La soupe, les sauces, les légumes confits, les gâteaux, tous les ingrédients de la cuisine japonaise forment avec l'ombre un accord parfait, comme les
yôkan, confiseries à consistance gélatineuse, ainsi décrits dans ce passage de la belle traduction de René Sieffert: "Leur surface trouble, semi-translucide comme une jade, cette impression qu'ils donnent d'absorber jusque dans la masse la lumière du soleil, de renfermer une clarté indécise comme un songe, cet accord profond des teintes, cette complexité, vous ne la trouverez dans aucun gâteau occidental".
"Dans le bain japonais", nº428-429, (1983), Patrizia Lombardo.

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抹茶 [macha], thé vert

"Dans la voie du thé, qu'il s'agisse de la cérémonie dont la pratique a débuté à la fin du Moyen Âge ou du rituel élaboré au 18e siècle, il est question pour les pratiquants de partager un même lieu, de converser autour de l'origine des ustensiles employés ou encore de deviser sur la peinture ou les fleurs qui ornent la pièce. Partager cet instant est quelque chose de nécessairement éphémère. Comme ce moment est unique, il convient de choisir avec soin les fleurs et l'élément pictural à disposer dans l'alcôve décorative, les récipients et les sucreries à servir, et les vêtements à porter, en fonction du temps, de l'humidité, de la température ainsi que l'état de la floraison. Même les ustensiles pour la cérémonie changent selon les saisons. Les mots pour en parler doivent aussi être choisis avec précaution et appropriés aux circonstances. Il était essentiel que fusent les traits d'esprit car il importait que l'espace-temps ainsi créé fût le plus vaste possible."
Annales, 1995 "Le Japon de l'époque d'Edo et l'univers du mitate"

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晩春 [banshun], Printemps tardif

"Printemps tardif" (1949) est l'histoire de Noriko, en âge de se marier, qui vit seule avec son père devenu veuf.
Ozu explore ici avec humour et mélancolie les relations familiales d'après-guerre. Les moeurs américaines font leur intrusion et se superposent au style de vie traditionnel. Noriko est interprétée par Hara Setsuko qui commence une longue carrière avec des rôles de jeunes filles aux plaisirs simples.

Banshun

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[fuji], glycines

"Le printemps a déjà passé, il y a peu de temps je le sais. Les azalées fleurissent encore, les glycines sauvages s'accrochent aux pins et un coucou de temps à autre vient me rendre visite. Les geais sont même venus me saluer et un pivert picore ici ou là…Des brises parfumées venues du sud descendent du sommet de la montagne et les vents du nord, humectés par les eaux du lac, apportent la fraîcheur. J'entends la voix du bûcheron qui chemine vers le mont Kasatori, et les chants des planteurs de riz dans les petites rizières au pied de la colline. Les lucioles tissent un ballet dans l'air du crépuscule…ici, la beauté abonde."
Matsuo Bashô

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[sakura], fleurs de cerisier

"Dès que les fleurs éclosent, les Japonais se précipitent par milliers pour aller pique-niquer sous les arbres (c'est hanami, aller admirer les fleurs). Cette coutume remonterait au 8e siècle. Les premières fleurs de cerisier annonçaient alors, qu'il était temps de commencer à planter le riz. Les paysans, animés par les croyances animistes shintô, pensaient que les cerisiers avaient une âme, si bien qu'ils présentaient leurs offrandes aux sakura pour que la récolte soit bonne. Ils n'hésitaient pas à participer à ladite offrande en buvant quelques coupes de sake au pied des arbres."
D'après " Japon: Miscellanées, par Chantal Deltenre

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[sakura], fleurs de cerisier

Sucreries, gâteaux traditionnels wagashi, boissons diverses, glaces, thé…au parfum de sakura, en forme de sakura, de couleur sakura, apparaissent dès le début de la floraison des cerisiers.

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花押 [kaô], signature

En cette période printanière qui voit la floraison des cerisiers un peu partout, évoquons ces calligraphies originales et élégantes réservées encore de nos jours à quelques privilégiés et qui peuvent remplacer une signature.
D'origine chinoise, elles apparaissent au Japon au cours de la période de Heian. Le nombre croissant de documents émis par les guerriers de Kamakura a considérablement accru l'utilisation des
kaô créés sur la base du véritable nom. Peu à peu, les styles et les formes se diversifient jusqu'à perdre tout lien avec le vrai nom. Ils sont alors remplacés par des sceaux gravés qui connaissent une grande vogue jusque dans les classes populaires au cours de la période d'Edo. En 1873, le gouvernement de Meiji stipule qu'un document sans sceau n'est désormais pas une preuve légale et le kaô disparaît peu à peu.

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松尾芭蕉 [matsuo bashô]

"Le pays est détruit, seules subsistent montagnes et rivières. Sur les ruines du château vient le printemps et l'herbe verdoie", me recitai-je. Assis sur mon chapeau de paille, oublieux du temps qui fuit, je laissai mes larmes couler.
Extrait du journal de Bashô "
La sente étroite du bout du monde" (Oku no hosomichi), lorsqu'il passe devant les ruines du château de Hidehira où périrent Minamoto no Yoshitsune et son compagnon Benkei.

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[ume], fleurs de prunier

D’origine chinoise, le prunier a été importé au Japon au cours de l’époque de Nara. Très tôt son évocation apparait dans les recueils de poèmes notamment le Manyôshû. En raison de la simplicité et de la pureté de leur forme, ces fleurs au parfum si délicat qui fleurissent sans faiblir au plus froid de l'hiver symbolisent parfaitement la fragilité, la délicatesse et le courage. Des raisons pour lesquelles les Japonais les aiment particulièrement sans oublier qu'elles annoncent aussi le printemps et les beaux jours.

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八十八夜 [hachijûhachiya], soir du 88e jour

Selon le calendrier lunaire, le printemps arrive le 88e jour après risshun, c'est à dire le 2 mai. En théorie, les gelées ne présentent plus de danger et l'on peut procéder aux premières récoltes de thés d'exception, appelés aussi thés du 88e jour. Ces thés primeurs aux saveurs intenses sont très attendus et sont l'objet de festivités dans les régions théicoles traditionnelles (Sayama à Saitama, Uji et Shizuoka).

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花祭り [Hana matsuri]

En avril, c'est la rentrée des classes. Les petits Japonais qui entrent à l'école primaire portent tous fièrement un gros cartable sur le dos, le fameux randoseru (déformation du mot ransel, nom du paquetage importé des Pays-Bas à l'époque d'Edo et porté par les soldats). La tradition veut que les grands-parents offrent ce premier cartable (prix moyen: 500 euros). Il s'agit là d'un véritable symbole qui marque le début de la scolarité et qui fait le bonheur des magasins spécialisés !

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東福寺 [Tôfuku-ji], temple à Kyôto, célèbre pour ses fameux damiers de pierre et de mousse

"Pluie d'averse
Sans un bruit sur la mousse
Me reviennent les choses du passé".
Yosa Buson

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花祭り [Hana matsuri]

"Le ciel, la terre et moi formons un seul et même être", aurait dit le Bouddha au moment de sa naissance, un 8 avril il y a 2500 ans. Ces statuettes "tanjô-butsu" (naissance de Bouddha) le représentent debout, bras droit levé pointant le ciel du doigt et bras gauche baissé vers la terre, paume de face. Lors de cette fête des fleurs (hana-matsuri), la statuette baigne dans un bassin rempli de thé sucré que les fidèles puisent à l'aide d'une louche en bambou pour l'arroser.

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燕子花図 [Kaki tsubata zu]

La floraison de cette variété d'iris d'eau a lieu en avril-mai. Le musée Nezu (Tôkyô) abrite l'oeuvre magistrale d'Ogata Kôrin peinte sur deux paravents (1702). La composition simple, répétitive et rythmique préfigure un style moderne et graphique. Les couleurs: bleu, vert et or. Une visite dans le sublime jardin s'impose ensuite pour y admirer les iris en fleurs mais en vrai, cette fois !

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お彼岸 [o-higan]

Cette fête qui trouve son origine dans le bouddhisme correspond aux équinoxes de printemps et d'automne. A cette occasion, les Japonais se rendent sur la tombe de leurs ancêtres (お墓参り o-hakamairi) pour y prier et y déposer fleurs et encens. Le o-hagi, un petit gâteau traditionnel à base de pâte de riz et de haricots rouges est consommé pendant ces quelques jours.

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七草 [nana kusa]

Les 7 herbes du printemps se consomment mélangées à une soupe de riz nanakusa-gayu (七草粥), juste après les festivités du Nouvel an, le 7 janvier. Ces herbes sauvages fraichement ramassées et coupées (céleri chinois, bourse à pasteur, gogyô, morgeline, hotokenoza, navet et radis blanc) sont supposées apporter force et santé. Une façon de commencer l'année sainement…

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春画 [shunga], images érotiques

Les images de printemps shunga ont connu leur âge d'or au cours des années d'Edo (1603-1868). D'origine chinoise, elles auraient été utilisées dans un but médical.
Un rôle protecteur contre les mauvais esprits et les catastrophes leur a également été attribué. Ainsi, les guerriers les cachaient-ils sous leur armure et les marchands les plaçaient-ils dans leurs entrepôts afin de protéger leurs biens contre les incendies notamment.

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物の哀れ [mono no aware]

Ce concept esthétique qui traduit "l'émouvante intimité des choses" exprime une sorte de "poignance" et de tendresse envers elles, liées au sentiment de leur impermanence. Dans l'aware, il n'y a pas à proprement parler de douleur mais de la tristesse et de la beauté. Cette beauté qui provoque de la tristesse est étroitement liée à la fugacité de ce qui nous entoure, aux saisons et par là même à la brièveté de la floraison.

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早春 [sôshun], Printemps précoce

"Printemps précoce", un film de Yasujirô Ozu, sorti en 1956.
"Les films d'Ozu parlent du long déclin de la famille japonaise, et par là même du déclin d'une identité nationale".
Wim Wenders

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たんぽぽ [tanpopo], Pissenlit

La fleur de pissenlit (tanpopo) est un motif printanier très populaire au Japon. C'est aussi le titre d'un film de Itami Jûzô, sorti en 1985, et où il est beaucoup question de nouilles japonaises… Sa mort en 1997 à Tôkyô est encore controversée (suicide ? assassinat commandité par la pègre ?).

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