La capitale transférée de Nara à Heian-kyô annonça le début de la période de Heian (794-1192). La domination exclusive de la famille Fujiwara, la naissance et le développement des domaines, la multiplication des liens de clientèle marquèrent l'entrée dans un nouvel âge. Au début de l'ère, le Japon interrompit ses relations diplomatiques avec la Chine et l'on vit naître un style proprement japonais dans tous les domaines (architecture, arts, écriture, costumes…).
Le système politique de la cour fut de plus en plus influencé par le cérémonial et envahi par le formalisme qui, à partir de la fin du 10e siècle, prit une importance considérable.
Le protocole jouait alors un rôle central dans la vie de cour où les cérémonies constituaient la base du "gouvernement par les rites" selon la conception chinoise de tradition confucéenne. Le vêtement faisait l'objet de règles précises relatives à la combinaison des tissus, des couleurs et des motifs. Chacun devait trouver un équilibre subtil entre l'observation des règles de l'étiquette et son inspiration personnelle.

COSTUMES FÉMININS PORTÉS À LA COUR
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Au début des années Heian, l'influence chinoise (dynastie Tang, 618-907) est encore présente dans les codes vestimentaires. Les vêtements que portaient l'empereur, son épouse et les dames du palais jusqu'au 5e rang lorsqu'elles étaient en service à la cour ou lors d'un cérémonial avaient été hérités de la Chine. Ils subirent peu de changements au cour de la période de Heian. Ce n'est qu'au milieu de la période que la vogue des vêtements à la chinoise déclina auprès de la noblesse et que l'habillement ainsi que les coiffures féminines s'adaptèrent progressivement au goût japonais.
L
a cour s'isola dans un monde de littérature, de peinture et de plaisirs (poésie, musique, festivals et cérémonies diverses, voie de l'encens, mode vestimentaire...). Courtisans et courtisanes se devaient d'afficher leur sens de l'esthétique et du raffinement en choisissant avec un soin particulier les associations de couleurs de leurs parures qui ne manquaient pas de s'accorder à la saison, aux couleurs présentes dans la nature, au moment de la journée, à l'humeur, aux sentiments du moment... Une réputation pouvait se faire ou se défaire sur le simple choix d'une combinaison heureuse ou malheureuse de couleurs même si la garde robe féminine était moins exposée au public que celle des hommes.
Le statut des femmes était déterminé par la naissance et le mariage. Dès sa naissance, la femme se trouvait recluse à la cour, un monde hermétiquement clos, sans espoir d'en sortir.
Le choix de vie des femmes de très haute naissance était limité: elles pouvaient entrer au palais comme épouse impériale ou devenir l'épouse d'un haut dignitaire ou nonne. Les épouses des hauts dignitaires menaient leur vie confinées dans leur résidence et entourées d'un nombreux personnel et avaient rarement l'occasion de quitter leur maison. Les femmes de moyenne noblesse passaient aussi leur vie à la maison ou pouvaient être au service des épouses impériales ou des princesses. Seules les femmes du service intérieur du palais pouvaient participer à la vie publique.
Bien que totalement assujetties à l'autorité impériale comme à celle de l'homme en général et astreintes à une attitude de passivité et d'affabilité, quelques femmes d'exception (Sei Shonagon, Murasaki Shikibu) ne se laissèrent pas conditionner et refusèrent de réduire leur univers mental à leur habitation.
Peu de tissus et de robes d'autrefois ont pu être conservés mais les rouleaux peints de cette période montrent des personnes de la haute société vêtues de somptueux vêtements de soie qui témoignent d'un sens très développé des motifs et des couleurs.
Le costume féminin se répartit en trois grandes catégories:
● le costume d'apparât et les tenues formelles avec la tenue la plus somptueuse qui date de la fin des années Heian (nyôbô shôzoku ou itsutsu ginu karaginu mo), communément appelée juni-hitoe (douze tuniques) depuis l'époque d'Edo.
● les costumes semi-formels comprenaient un manteau court (
ko-uchi) et un manteau long (hosonaga)
● l'habit informel, représenté par plusieurs styles de tenue.
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Cette dame de la noblesse est revêtue d'un costume de cour inspiré de la mode chinoise et à l'image de divinités féminines telles que l'on pouvait se le représenter.
Coiffée dans un style (
ikkei) déjà en vogue à la cour de Nara avec une partie des cheveux remontés en chignon à l'arrière, elle arbore un maquillage (kaden) qui consiste à appliquer une touche de fard coloré entre les sourcils et aux coins de la bouche sur un visage blanchi.
Une petite veste brocardée sans manche (
karaginu) est portée sur une tunique fermée par deux cordelettes décoratives (kazarihi) qui descendent à l'avant. Une longue écharpe (hire) blanche en soie semble flotter sur les épaules et une jupe plissée (mo) bleu ciel doublée d'une autre (shitamo) violet clair un peu plus longue sont maintenues par des ceintures.
LES MODES DE LA COUR IMPÉRIALE
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Dame issue de la noblesse en service au palais impérial et auprès des nobles de haut rang. Elle porte le costume officiel mono-no-gu shôzoku que l'on pourrait assimiler à la tenue la plus officielle de toutes, à savoir le jûni-hitoe, qui signifie douze hitoe (tunique non doublée) mais qui en réalité n'en comporte pas autant et c'est la raison pour laquelle il vaudrait mieux utiliser le terme nyôbô-shôzoku qui signifie plus justement "costume des dames" et qui comporte un mantelet et une traîne.
À une époque où des règles particulièrement strictes avaient été émises concernant le costume, il faut noter ici quelques détails particuliers: 2 bandes de tissu (
kuntai) qui tombent sur le devant de chaque côté du mo, une étole hire et une couronne en métal ornée de joyaux. Quant à la coiffure, les cheveux sont relevés à l'arrière et noué en une sorte de chignon au sommet de la tête.
Pour le reste, le costume est composé d'une succession de vêtements que l'on enfile dans l'ordre:
  • un uchibakama (sorte de jupe-pantalon) écarlate très long qui recouvre les pieds.
  • un kosode blanc
  • un hitoe
  • 5 uchiki (itsutsuginu) de même forme mais de couleurs différentes dont les dégradés étaient soumis à des règles strictes
  • un dernier kimono de dessous (uchiginu)
  • une robe de dessus (uwagi)
  • une veste brocardée (karaginu)
  • une traîne (mo), sorte de jupe-tablier plissée, en fine soie blanche brodée était portée à l'envers sur la veste et nouée sous la poitrine. La veste et la traîne formaient les pièces maîtresses de ce costume formel.
  • l'accessoire indispensable pour les femmes de la cour: un éventail (akome-ôgi) en lamelles de cyprès (hinoki) du Japon. Il est porté avec le jûni-hitoe et l'habit de cérémonie des femmes de la noblesse. Il est abondamment orné de motifs floraux et de noeuds composés de fils aux 6 couleurs. On le porte à la main, fermé et enroulé de ses cordons décoratifs.
  • aux pieds, des tabi (shitôzu), sorte de chausson sans séparation au niveau des doigts de pieds et fermés par deux cordons. Les chaussures (kutsu) sont recouvertes de soie épurée du même rouge que le nagabakama.
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Les déclinaisons colorées du itsutsuginu en particulier imitaient les nuances présentes dans la nature et se révélaient au niveau du col, des poignets et du bas du costume grâce au décalage progressif de chaque robe. Ces subtiles variations qui étaient tout d'abord des choix personnels se standardisèrent et s'officialisèrent peu à peu pour constituer un code de règles esthétiques particulièrement complexe et rigoureux (kasane irome).
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Superpositions de vêtements au niveau des manches: pour les occasions exceptionnelles à toutes saisons.
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Superpositions de vêtements au niveau des manches: à partir du 1er octobre jusqu'en février.
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Superpositions de vêtements au niveau des manches: à partir d'avril.
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Dame de la haute noblesse en costume formel karaginu-mo no shôzoku (appelé communément de nos jours jûni hitoe). Ce costume fit son apparition vers la 2e moitié du 10e siècle et devint bientôt l'habit quotidien porté au palais par les épouses de hauts dignitaires, leurs dames de compagnie ainsi que les dames de compagnie au service d'un noble de haut rang. Il est l'équivalent du sokutai masculin.
Cette superposition de kimonos faisait ressortir la minceur du visage et la fragilité du corps enfoui. Les robes étaient faites de tissus de soie damassée de couleur unie ornée de motifs conventionnels (la laine n'existait pas et le coton ne fut introduit qu'au milieu du 16e siècle).
Dans la main droite, un éventail en cyprès et dans la main gauche, plusieurs feuilles de papier rouge orangé pliés dont le rôle n'est pas défini.Toutes les dames de la cour se cachaient le visage derrière un éventail en lames de cyprès.
Les cheveux sont portés très longs et déliés dans le dos.
En cas d'événements exceptionnels, la coiffure (o
suberakashi) adoptée avec ce costume nécessite plusieurs accessoires pour la relever (peigne plat, hirabitai placé debout à l'avant de la perruque, diverses épingles kôgai et saishi). Une décoration métallique (kokoroba) en forme de rameau d'or ornés de fleurs de prunier est fixée au hirabitai. L'ensemble est complété par des décorations pendantes faites de longs cordons (hikage no ito).
Sous ces longues robes, les femmes continuaient à porter un hakama rouge vif ou blanc à même la peau sans autre sous-vêtement.
Cette tenue est encore portée de nos jours au palais impérial à l'occasion de cérémonies.
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Genji monogatari emaki: chapitre 4, Takegawa II. Cerisiers en fleurs et atmosphère printanière. Deux dames de compagnie sont assises sur une véranda arborent de somptueux vêtements.
"Les femmes de l'époque de Heian ont les yeux étirés, une bouche menue mais les joues pleines. La clarté de leur peau (blanchie) anime la pénombre des demeures. Leur beauté se mesure à la longueur de leur chevelure qui doit excéder de cinquante cm environ la taille de leur propriétaire…Le fard (blanc) pour le visage, utilisé par l'aristocratie, se propage parmi les courtisanes et les jeunes danseuses; il s'applique en couches de plus en plus épaisses. L'usage de se teindre les dents en noir se répand à la cour
pour se différencier des esclaves et des animaux…Les femmes s'épilent les sourcils pour redessiner à la place l'arc idéal, fin et long, à l'encre de Chine. Parfois, ils sont redessinés plus haut sur le front en formes estompées répondant aux noms poétiques de rossignol ou brouillards légers de printemps…L'ensemble doit apparaître immatériel et inexpressif, comme un masque de détachement de d'ennui composé pour mettre un paravent à l'expression de ses sentiments…Les hommes ne dédaignent pas y avoir recours. Au 12e siècle, les hommes de qualité, en particulier les nobles partant au combat, se maquillent, se laquent les dents et se parfument pour, suprême délicatesse, ne pas indisposer l'adversaire qui leur trancherait la tête".
Dominique Buisson, Esthétiques du quotidien au Japon
LES COSTUMES SEMI-FORMELS
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Le costume semi-formel itsutsuginu-ko-uchiki se compose d'un manteau court ko-uchiki en forme de kimono qui remplace la veste courte karaginu. Plus court que les vêtements du dessous (uchiki, les cinq robes (itsutsuginu), tunique hitoe, hakama rouge), il laisse voir le dégradé subtile du bas des robes. Les cheveux sont toujours d'une longueur impressionnante.
Le
hosonaga est une autre variante de la tenue semi-formelle et ne comporte ni veste ni traîne. C'est aussi le nom d'un manteau long dont la forme est mal connue.
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LES TENUES INFORMELLES
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Cet ensemble d'hiver était porté au quotidien par les femmes de la cour. Le uchigi du haut est superposé avec un hitoe et une tunique blanche portée à même la peau. Même si les tissages épais étaient adaptés à la saison hivernale, il fallait parfois plusieurs couches de tuniques pour résister au froid. En bas, un long hakama rouge écarlate recouvre les pieds.
Une variante qui composait
la tenue ordinaire à porter en privé était se superposer un uchiki court avec une robe de dessus (uwagi) et un kosode en dessous. Cette tenue est dépourvue de veste, de traîne et de manteau.
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En été, les tissus sont légers et parfois ajourés. Le hakama rouge et la tunique blanche du dessous sont associés à un hitoe et un uchigi en soie ajourée par dessus.
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Pendant les mois d'été où la chaleur est accablante, tous les milieux sociaux portaient portaient des vêtements en lin, en chanvre ou en fibres de bananier provenant des îles Ryûkyû.
Les nobles ne portaient qu'un
hitoe-bakama, composé d'un kosode blanc et hakama rouge à même la peau, qui constituaient la tenue la plus légère et la plus décontractée.
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Un kakeginu teint ou tissé et orné de motifs est porté autour de la taille sur un kosode blanc.

VOYAGER ET SORTIR
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Cette tenue originale et protectrice apparue à la fin des années Heian est portée par les femmes aisées lors de leurs sorties, déplacements et voyages.
Elles revêtaient un manteau court
uchigi par-dessus le hitoe et la robe blanche du dessous (kosode). Ce manteau était maintenu en place par une ceinture étroite (obi-kake) placée au niveau des épaules.
Sur les bords d'un chapeau à larges bords en jonc tressé était fixé une sorte de long voile qui avait un rôle de protection mais qui permettait aussi de voyager dans l'anonymat. Les robes courtes et de solides sandales de paille facilitaient la marche.
LES FEMMES DU PEUPLE
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Les femmes du peuple portaient souvent des vêtements de lin (ou d'autres plantes végétales) ressemblant à la forme du kosode, fermés par un cordon ou un tablier, simples et pratiques pour travailler. À partir du milieu de Heian, elles étaient vêtues d'un kosode, sorte de longue tunique ample à manches larges et tombantes, croisé sur le devant. Par-dessus, elles rajoutaient une sorte de jupe plissée retenue par une ceinture étroite, qui pourrait être un vestige de la jupe mo des périodes antérieures. Des motifs teints discrets ornent l'ensemble.
Les cheveux sont courts et retenus à l'arrière par un lien de papier (
motoyui) épais.
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Au cours de la période précédente de Nara, les courtisanes (aussi connues aussi sous le nom de asobime ou ukareme), étaient souvent d'anciennes miko (servantes de sanctuaires shintô) qui avaient perdu ou délaissé leur statut et vivaient dans l'errance en s'adonnant à la prostitution. À partir de la période de Heian, la situation change avec des courtisanes cultivées dont les poèmes apparaissent parfois dans les compilations de l'époque.
Cette courtisane de Heian porte un manteau
uchiki sur un kosode mais dans un style facilement identifiable. Le bas est replié vers l'intérieur jusqu'à la taille et maintenu à l'aide d'un cordon kohimo. C'est une variante de la tenue de voyage classique évoquée plus haut.
Les femmes de la noblesse portaient elles aussi un
kosode avec un uchiki au quotidien.
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COSTUMES MASCULINS PORTÉS À LA COUR
Les vêtements masculins se transformèrent également.
Au début du XIe siècle, les costumes des hauts dignitaires et des guerriers de haut rang en service à la cour comprenaient une tenue officielle, le grand costume de cour
sokutai, le costume semi-formel (hôko) et sa version simplifiée, le costume semi-formel allégé, ikan, portés lors de visites au palais impérial.
Le costume cérémoniel
raifuku était réservé à l'intronisation et aux très grandes solennités (prémices, fête de Nouvel an…). L'empereur portait alors une tenue écarlate appelée ôsode (manches larges), à col rond. En-dessous, une chemise et une robe hitoe qui dépassaient de l'encolure et deux pantalons superposés rouge et blanc. Il était coiffé d'un bonnet kanmuri en gaze noire et d'une couronne en or, et tenait de la main droite le sceptre de dignité shaku.
SUKOTAI, LE GRAND COSTUME DE COUR
Les incertitudes quant aux us et coutumes du début de la période de Heian sont encore nombreuses mais il est possible d'affirmer que le costume ci-dessous correspondait à la tenue formelle portée par un fonctionnaire civil jusqu'à la première moitié du 10e siècle. Il a été reconstitué et inspiré d'éléments connus du Ministre de la droite, Sugawara Michizane (845-903). La robe du dessus est un hôeki à col rond (cousu sur les côtés) et porté seulement par l'empereur et les hauts dignitaires. La couleur mauve est correspond au titre de 2e rang. Le bas du vêtement (ran) est une pièce de tissu rapportée cousue à l'horizontale. Sous le , il porte une robe shitagazane et un hakama blanc.
Le
shaku est en ivoire et le obi en cuir est décoré d'éléments en bronze et d'améthystes. Une autre ceinture plate (hirahimo) fermée sur le devant permet de fixer le sabre. Les chaussures sont à bouts pointus et relevés (hanataka).
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Le sokutai est apparu dans la 2e moitié du 10e siècle, selon les règles du code Yôrô, alors qu'on ne parlait que de chôfuku pour désigner les habits de cour. Il était toutefois encore très inspiré de la forme du costume officiel de la cour chinoise.
Réservé aux cérémonies officielles qui ont lieu à la cour impériale (nomination d'un
shôgun, arrivée d'un messager à la cour, visite à Nikkô…) et aux procédures administratives, individuelles ou collectives surtout en présence de l'empereur, il est porté par l'empereur lui-même jusqu'aux dignitaires du 9e rang. La couleur des robes désignaient le rang de chacun: rouge foncé pour le 5e rang, vert ou violet clair pour les 6e et 7e etc… Ici, il est en damas noir, une couleur autorisée seulement au-dessus du 4e rang.
Le
hakama du dessus (ue no hakama) montre un motif motif tissé quadrillé (arare) porté seulement à partir du 3e rang.
À noter que le
sokutai des guerriers (bushi) présentait de légères différences dans la forme, ceci afin de faciliter leurs mouvements.
Le
sokutai se compose de plusieurs pièces:
• un manteau (
ou ueginu ou uwagi) coupé comme un kimono avec un col rond qui monte haut et rallongé dans le bas du dos par une bande de tissu. Les côtés étaient cousus pour les fonctionnaires civils alors que pour les militaires de haut rang, ils étaient fendus. Les couleurs varient avec les rangs occupés par chacun et les époques.
• une tunique
hanpi à col croisé et manches courtes munie de pli en bas. Portée surtout en été.
• une tunique à très longue traîne étroite (
shitagasane), 4 m pour les régents, avec col rond. La couleur est choisie en fonction de l'occasion et la longueur indique le rang du personnage.
• une veste de dessous (
akome) rouge ou blanche, à col croisé et coupée comme un kimono.
• une tunique
hitoe rouge ou blanche qui descendait sous les genoux.
• un
uebakama, pantalon de dessus en soie blanche et noué avec un cordon.
• un
ôkuchi-bakama, culotte en soie rouge porté en dessous avec de grandes ouvertures.
• une coiffe
kanmuri avec un ruban de gaze à l'arrière et dont la forme varie avec le rang.
• une ceinture en cuir laqué noir orné de pierres taillées (jade, agate)
• un sabre d'apparât,
kazatachi.
• un insigne de dignité
shaku, tenu à la verticale: planchette en bois où l'on pouvait coller un aide-mémoire sur l'intérieur lors de cérémonies.
• un éventail en lamelles de cyprès
hyôgi placé dans la ceinture.
• quelques feuilles de papier repliées
tatô-gami pour y écrire ou servir de mouchoir étaient placées avec l'éventail.
• des chaussettes en soie blanche étaient portées dans des chaussures en bois laqué noir (
asagutsu), une sorte de sabots.
"Le costume de Heian", Cipango
Charlotte von Verschuer
SOKUTAI POUR MILITAIRE
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Cet officier de la cour impériale du 5e rang muni de son arc porte un sukotai d'été. La partie souple de la coiffe ken-ei est enroulée sur elle-même et sur les côtés, un ornement oikake fait de crin de cheval teint en noir est disposé de chaque côté au dessus des oreilles. La robe rouge en soie sha à col rond est un hitteki, porté par les militaires; les coutures de côté ne sont pas cousues et il ne comporte pas le ran, cette pièce rajoutée sur le bas des robes. En-dessous, il porte un tunique sans manche hanpi bleu indigo, un shitagasane (avec la traîne), un hitoe rouge, et un hakama de dessus (ue no hakama). La ceinture sekitai est ornée de joyaux. Sur le côté droit est suspendu un insigne de dignité gyotai. Un shaku, des feuilles de papier tatô et un éventail en cyprès sont passés dans le devant de la robe. Dans le dos, des flèches sont disposées dans un carquois ornemental hirayanagui.
HÔKO, LE COSTUME SEMI-FORMEL
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Assez proche du sukotai, il comportait le manteau du dessus, , fermé par une ceinture, les tuniques (hanpi, shitagasane, hitoe) et la veste du dessous (akome). Le pantalon intérieur (shitabakama) était recouvert par un pantalon du dessus (sashinuki) bouffant très ample, noué à la cheville. Au 11e siècle sa longueur était telle que les hommes marchaient dessus. Motifs et couleurs étaient choisis en fonction du rang et de l'âge.
Ce costume était porté comme le grand costume
sokutai lors de cérémonies annuelles, de procédures administratives, de pélérinages etc… par les hauts dignitaires, les aristocrates mais aussi la petite noblesse. Il ne sera plus guère utilisé après la période de Kamakura.
IKAN, LE SEMI-FORMEL ALLÉGÉ
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Le ikan qui signifie "manteau et coiffe" était aussi appelé "costume de service de nuit" car il servait pour le service de nuit des fonctionnaires dans la résidence impériale.
Cette version allégée du
sokutai ne comportait ni traîne, ni ceinture sertie de pierres. Le manteau du dessus rouge se fermait par une simple ceinture en soie. Le pantalon sashinuki violet était serré aux chevilles par des cordons. Ici, ce noble ne porte pas de chaussons blancs qui étaient autorisés seulement à partir de 40 ans.
En hiver, le
ikan était associé à une coiffe, un éventail en cyprès et plusieurs feuilles de papier plié tatôshi sous le bras droit. Il deviendra plus tard un substitut du "grand habit" qui lui, n'était plus porté que lors des circonstances les plus solennelles.
Il servait pour les déplacements, les visites officielles et les affaires des fonctionnaires et courtisans au palais mais n'était pas admis en présence de l'empereur. Porté par les militaires et les fonctionnaires civils, il deviendra, à la fin de la période de Heian, la tenue des courtisans.
NÔSHI, L'INFORMEL
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Le nôshi shôzoku est le vêtement ordinaire et informel qui se portait chez soi ou ailleurs, dans un cadre privé. Il était porté par la noblesse de cour à l'époque ancienne et c'est en 818 qu'il aurait été réglementé et utilisé à partir du milieu du 9e siècle.
Le haut était composé d'une tunique ample à larges manches fermé sur le côté gauche. En dessous, le
akome, une tunique intermédiaire qui dépassait légèrement en bas (idashi-ginu), devant et derrière. Le pantalon bouffant sashinuki était serré aux chevilles.
La forme du bonnet
eboshi variait selon les circonstances et le lieu. La couleur du vêtement n'était plus imposée en conformité avec le rang social comme pour les autres costumes de cour, aussi l'appelait-on zappô (de couleur libre). Toutefois, il devait s'harmoniser avec les saisons et s'adapter à l'âge.
Les hauts dignitaires jusqu'au grade de second conseiller (
chûnagon) et d'auditeur (sangi) pouvaient être autorisés (sur ordre impérial) à le porter quand ils se rendaient au palais.
Il existait une forme allégée du
nôshi, sans pantalon bouffant mais avec un nagabakama seulement.
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HITATARE
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Le
hitatare était un vêtement de nuit molletonné, porté par les nobles. Il devint par la suite le vêtement ordinaire des nobles et des guerriers, puis l'habit de cérémonie des familles de guerriers. Il comportait deux parties: un hakama (ici en version longue) qui se portait au-dessus d'une tunique à manche plutôt courtes et dont le col était déjà celui du kimono actuel.
À l'époque de Kamakura, le
hitatare devint le vêtement ordinaire des bushi qui le mettaient sous leur armure.
KARIGINU, COSTUME DE CHASSE
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Le kariginu était le costume non-officiel porté habituellement pour aller à la chasse (aux faucons notamment). À l'origine, il était appelé hoi 布衣 (vêtement d'étoffe). Avec le temps, son usage a changé et il est devenu l'habit quotidien porté par la petite noblesse (fonctionnaires civils et militaires de la cour). Les fonctionnaires du 5e rang et au-dessus devaient porter un kariginu aux motifs tissés et à doublure et ceux du 6e rang et en dessous un kariginu sans motifs tissés et sans doublure.
L'encolure était ronde. Les manches longues ne recouvraient pas les mains et n'étaient attachées au buste qu'au niveau des épaules et pourvues de cordelettes d'attache, ceci pour faciliter les mouvements et exhiber les somptueux tissus des tuniques aux motifs tissés du dessous. Simple habit de chanvre au début, il devint de plus en plus luxueux jusqu'à ce que des édits interdisent les excès et soient publiés à plusieurs reprises.
Il se portait avec une coiffe
eboshi.
Le pantalon
sashinuki ou le pantalon de chasse karibakama était bouffant.
C'était aussi l'habit des subalternes, des suivants et des porteurs de palanquins dans les cortèges et les pèlerinages. Actuellement, le
kariginu est encore porté par les officiants des sanctuaires shintô.
Par la suite, les guerriers du Moyen-âge et du
bakufu d'Edo le porteront comme vêtement "correct".
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Kitano tenjin engi: deuxième rouleau, deuxième scène.
Séance de tir à l'arc dans la cour du palais. Le grand homme d'État Sugawara Michizane vise la cible. Des spectateurs tout autour (hôtes, serviteurs, gens du peuple) le regardent fascinés.
LES GUERRIERS
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Instabilité sociale et insécurité règnent au 10e et 11e siècle et une partie des élites de province se militarise, organisant de manière indépendante des milices privées donnant ainsi naissance à un nouveau groupe social, celui des guerriers bushi.
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Le samurai avait besoin d'une armure qui allie résistance et légèreté. On utilisa donc diverses armures constituées d'un assemblage de plaquettes métalliques solidement lacées les unes aux autres. Les lamelles des yoroi se présentaient comme de petites écailles de fer liées ensemble pour obtenir une bande horizontale hermétique généralement laquée en noir. En assemblant plusieurs bandes qui se chevauchaient légèrement, on arrivait à former une armure. Les lacets (en cuir ou en soie) étaient teintés de couleurs voyantes. Le dos, le devant et le côté gauche formaient une seule pièce. Les épaulières (sode) fixées dans le dos protégeaient le dessus des bras mais laissaient les avant-bras sans protection. La manche était une longue pièce de tissu sur laquelle étaient cousues des plaques de métal. Peu adapté aux combats à pied, il fut abandonné ultérieurement. D'après "Les samourais", S.Turnbull
C'est à la fin de cette époque que l'usage des armures se développa considérablement. Ce chef d'armée porte un
ô-yoroi, l'uniforme le plus solennel. La visière à l'avant du casque (maedate) est orné d'un kuwagata, dont la forme évoque la houe (kuwa) des paysans. Sous l'armure, il porte un hitatare.
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Heiji monogatari emaki, L'incendie du palais Sanjo, un épisode dramatique de la rébellion Heiji en 1160 qui vit les Minamoto s'élancer à l'assaut du palais de l'ex-empereur Go-Shirakawa.
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Garde impérial en uniforme kachi-e.
Ce militaire de rang inférieur porte un habit dont les manches et les côtés sont cousus, comme c'est le cas aussi pour le
ketteki-hô. Sur chaque côté de la coiffe hoso-ei, au-dessus des oreilles, une décoration en forme d'aigrette en crin de cheval était fixée formant un bel arrondi (on retrouve ces petits détails sur les poupées hina-ningyô). Sous l'uniforme, un hitoe et un hakama bouffant à l'ourlet remonté (kukuri-bakama). Des guêtres habaki en roseaux tressés protègeaint le bas des jambes avec des chaussures en paille tressée (waragutsu) ou des sandales midare-o). Il porte un sabre laqué noir et un arc et des flèches.
Lorsqu'ils escortaient des nobles ou convoyaient de hauts personnages, leurs habits étaient ornés de grands cercles teints (
surimono) en forme de chiens-lions ou d'ours qui variaient en fonction de la province qui les employaient.
LES GENS DU PEUPLE
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La culture populaire au Japon s'est forgée à partir du monde paysan (travaillant la rizière, vivant de la montagne ou de la mer) lié aux cultes animistes et aux fêtes paysannes et du monde des artisans. On connaît mal les moeurs des gens du commun du Moyen Age mais cette culture a pu être diffusée grâce à une population itinérante peu nombreuse à la fois crainte et respectée comme les prêtresses (miko) pratiquant souvent le chamanisme, les moines mendiants, les musiciens aveugles, les danseurs et autres saltimbanques. Ce sont eux qui en parcourant le pays de long en large diffusèrent une certaine culture populaire qui se développa en marge des coutumes et des valeurs de la cour particulièrement raffinée à cette époque.
Les populations rurales qui vivaient dans des régions isolées tissaient des étoffes grossières à partir des fibres de glycine et de mûrier qui fournissaient également la matière première pour la fabrication du papier.
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Les gens du petit peuple de Heian continuaient à porter des kosode (forme simplifiée du futur kimono) grossiers tissés en chanvre ou autres fibres végétales. Ces mêmes kosode portés à l'extérieur par le peuple étaient utilisés comme vêtement de dessous par les nobles.
Une autre tenue était le
hitatare qui était constitué d'une tunique courte ou d'une veste à manches étroites fermée devant et qui était rentrée dans une sorte de pantalon hakama fermé par une ceinture. Le col officier des costumes aristocratiques est remplacé par un col croisé. La largeur des manches peut se régler par des cordelettes et faciliter ainsi les mouvements. Les jambes du hakama (kukuri-bakama) étaient remontées et rentrées dans des guêtres. Ils portaient de simples sandales en paille tressée.
Les guerriers de la fin de Heian commencèrent à l'adopter et il devint le vêtement ordinaire des nobles et des guerriers. Plus tard, les familles de guerriers l'utilisèrent comme vêtement de cérémonie.
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Les kanjis qui composent le terme suikan 水干 signifient "laver à l'eau et sécher". Cette casaque en chanvre ou en soie était empesée avec de l'eau avant d'être mise à sécher. À l'origine, il était porté par les gens du peuple et les fonctionnaires sans rang. Le suikan fait son apparition vers le milieu de la période de Heian et sa forme est identique à celle du kariginu: le col est rond (agekubi) mais comporte 2 cordons au niveau de l'encolure. La couleur et les motifs n'étaient soumis à aucune règle.
Les jambes du
hakama restent bouffantes et sont resserrées dans des guêtres habaki (en roseaux tressés), utilisées lors de sorties. Fin Heian, la mode était aux ornements originaux et il n'était pas rare de voir toutes sortes de décorations (tsukemono) rajoutées sur les vêtements. Ce hôben (délinquant, malfrat, homme de main) de la fin Heian, assistait les policiers bien qu'ayant déjà été condamné à des peines légères puis relâché et contrôlait les quartiers tout en fournissant des informations.
C'est à partir de la période de Kamakura que les guerriers (
bushi) et les nobles se l'approprièrent. Les guerriers le porteront comme tenue formelle au même titre que le kariginu.
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COULEURS ET MOTIFS

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Les couleurs vives et contrastées des costumes des périodes d'Asuka (552-645) et de Nara (645-794) issues de croyances magico-religieuses étaient intimement liées à l'art bouddhique et à l'influence sino-coréenne. Les teinturiers chinois qui officiaient à la cour instaurèrent cinq couleurs officielles en plus du blanc (jaune, pourpre, rouge, bleu-vert et noir). Celles-ci appartenaient à un système philosophique et religieux complexe et indiquaient les rangs occupés au sein de la cour.

En 603, un système inspiré de cette pratique chinoise fut appliqué par Shôtoku Taishi et permit également de définir les rangs et statuts officiels du gouvernement (kurai iro).
La palette des costumes de cette époque montre des nuances subtiles de mauve, violets, jaunes et verts, des dégradés de roses, de rouges, de bleu-ciel et de blancs. Le noir et les couleurs sombres étaient peu appréciées car elles marquaient une rupture avec la cour (exil, vie monacale, deuil).
Les teintures des tissus constituaient une tâche pratiquée au sein des demeures aristocratiques. La maîtresse de maison supervisait les travaux et son sens de l'esthétique ainsi que ses connaissances techniques déterminaient la qualité des couleurs et les infimes nuances. Les vêtements qui étaient alors tissés dans des couleurs unies ne présentaient pas de motifs complexes.
Certaines couleurs étaient strictement interdites car portées par l'empereur ou ses proches.
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Hazenoki,
couleur du
de l'empereur.
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Ôdan,
réservé au prince héritier (
)
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Aoiro,
couleur du
de l'empereur.
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Kokiaka,
réservé à l'empereur retiré (
).
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Komurasaki,
réservé aux plus hauts rangs (
).
D'autres couleurs avaient mauvaise réputation et il valait mieux éviter de les porter en temps ordinaire. Il arrive que sur les documents on puisse voir des robes noires sur les hauts dignitaires au-delà du 4e rang mais en réalité il s'agit d'un violet qui s'est assombri.
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Nibi-iro

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Usunoru

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Aonibi iro

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Kuro-tsurubami

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Kanzô iro

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Kôji iro

Cette adaptation des motifs continentaux à une préférence “nationale” (yûsoku moyô) a donné naissance à des représentations qui furent conservées et adoptées par les générations suivantes des classes guerrières de la période de Kamakura pour finalement être assimilées, bien plus tard, par la majorité de la population.
Les modèles de ces motifs sont inspirés d'éléments de la vie quotidienne: cercles, losanges, polygones, lignes croisées, arabesques, lignes courbes, faune et flore... et l'on retrouve un bon nombre de ces motifs sur les tissus des kimonos actuels.
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